Dans le train, je bouche le passage vers l’autre compartiment. Une dame tousse derrière moi : « Pardon monsieur... » Je me retourne : c’est la contrôleuse. On se regarde sans rien ajouter, puis elle ouvre de grands yeux et dit : « Merde, j’ai oublié ma casquette. »
Il y a toute une équipe de handball féminin dans le train. Un type passe dans l’allée. Juste avant de quitter le compartiment, il crie : « Vous allez perdre ! »
Dans un magasin de lingerie de la galerie du Géant, une jeune femme avec un t-shirt « Ile de Sein »
Rêve de solitude dans un décor architectural grandiose, type carrière monoblocs genre Minecraft. Je passe mon temps à monter des escaliers, à en descendre, en espérant « ne pas croiser l’équipe d’entretien. »
L’équipe de handball féminin a gagné la demi-finale de la ligue des champions à Budapest.
Grand-mère montre des fleurs devant chez elle, qui sont si petites, si constellées, qu’on les appelle « le désespoir du peintre »
Eric a retrouvé son amour de jeunesse sur un téléphone portable. Comme elle a un nom très commun, ça ne servait à rien de la googliser. Une copine qui se dit voyante a prétendu qu’elle la retrouverait en tapant son simple prénom dans la barre de recherche. C’est la troisième photo qui est sortie.
Équipe de Handball féminin : cluster de 17 cas de covid après les célébrations de la victoire à Budapest.
Aujourd’hui, j’ai croisé coup sur coup deux hommes avec un moignon.
Au supermarché, je croise le directeur qui met des produits en rayon. « Ça va ? » « Oh, aujourd’hui on a de la visite. » Il me montre une pie qui vole au plafond.
« On ne sait pas comment la faire sortir. On a appelé la Mairie, ils nous ont dit le laisser les fenêtres ouvertes. »
En 1998, un avion de la Proteus airlines avec douze passagers à bord s’est détourné de son vol pour admirer le paquebot Norway, qui mouillait au large de Quiberon. L’avion a percuté un petit appareil de tourisme. Roger se souvient de naviguer entre les couronnes que les familles jetaient à l’eau.
Hôtel à Poitiers. Réveillés avec l’alarme anti-incendie. Fausse alerte. On remonte prendre le petit-déjeuner dans la grande salle. C’était le grille-pain.
Potiers, Carrefour Market. Une vendeuse essaye d’empiler des citrons, mais ça ne marche pas. Elle s’énerve : « Eh Manon, c’est quoi ton idée de merde ? »
« Pfff, tout ça pour en arriver à faire des pyramides de citrons, putain, c’est quoi ce truc dépressif ? »
Plus loin, un handicapé accompagné de son assistant de vie. L’handicapé est habillé à l’anglaise, avec un chapeau. L’assistant porte un sac à dos, des chaussures de rando et une casquette. Il est très à cheval sur la discipline, le précède dans les rayons, s’arrête brusquement, au risque que l’autre l’emplafonne, en criant « STOP ! ». Quand il repart, il dit très fort, sur un ton saccadé, en détachant chaque syllabe : « OK, ON REPART JOE ? »
Lorsque l’autre se laisse distancer d’un seul mètre, l’assistant se retourne et crie, exaspéré : « TU ME SUIS, JOE ? »
Quand Joe le dépasse, il s’arrête et se pince l’arête du nez en respirant très fort :« NON JOE, NOOOOON. TU LE SAIS JOE. TU DOIS M’ATTENDRE JOE. »
L’handicapé émet un bref borborygme. C’est la goutte d’eau. L’assistant s’arrête et approche son visage tout près de celui de l’autre : « TU-NE-CRIES-PAS, JOE, S’ILTE PLAIT ! »
Je les recroise avant la caisse. On manque de se télescoper au sortir d’un rayon. L’assistant bloque l’handicapé d’un bras horizontal : « STOP, JOE ! »
Comme je leur fais signe de passer avant moi, il lève les mains : « AH C’EST COMME VOUS VOULEZ, HEIN ! » J’insiste, il passe à la caisse.
Joe laisse échapper un filet de bave, qui tombe par terre. L’autre trépigne de rage : « JOE, TU-NE-FAIS-PAS-CA ! TU LE SAIS, JOE ! »
Il s’adresse à la caissière : « Deux notes séparées, une avec facture pour moi, voilà... JOE, VIENS PRENDRE LA FACTURE ! » Et il ajoute en ricanant : « C’est quand même ton fric, hein. »
Marché à Murol : « Achetez mon Aligot ! Mesdames, messieurs ! Achetez mon Aligot ! Ça fait vingt ans que je la fais, c’est la première fois que je la réussis ! »
Laboratoire d’analyse pour une prise de sang. Salle d’attente. J’entends une dame à l’accueil : « Mais c’est où exactement, la thyroïde ? »
Elle ajoute : « Belmondo ? Il habitait à vingt mètres de chez moi ! »
Entendu dans la rue : « Vous partez ? Pff, de toutes façons, les gens ne font que ça dans la vie : partir ! »
Je cherche à rejoindre les enfants à la grève bleue, une plage dont je crois me rappeler où elle se trouve, mais dont j’ai oublié le chemin. Je roule en confiance, refusant le GPS, et je décide de tourner sur la gauche, sur une toute petite route de campagne, en me disant qu’elle va forcément vers la mer. Après m’être perdu et avoir roulé pendant une heure sur des routes obscures, je repasse devant l’endroit où j’ai bifurqué. Sur le panneau, c’est écrit à la peinture verte : « Route de Null Part »
A Montparnasse, un clochard tatoué de la tête aux pieds écoute « La bohème » sur une enceinte bluetooth.
Épitaphe cimetière Montparnasse : « Je prie pour je ne sais qui et j’espère Jésus Christ »
Je fais des recherches sur Saint Maudez, et je liste les villages qui lui doivent leur nom, comme Lanmodez. Chez le poissonnier, une heure après, je regarde les huîtres : origine, Lanmodez.
Au marché, je demande un kilo de carottes. Le gars en prend cinq ou six, pèse le tout : 1 kilo pile. Il hausse les épaules : « Faut croire que j’ai un don. »
Il tempère :« Mais les dons, ça marche pas à tout les coups. »
Je lui demande aussi un kilo de patates. Il en prend deux poignées, les pèse : un kilo pile, encore.
Dieux d’eau : quand les gars des eaux purgent les bouches d’incendie, pendant qu’elles crachent sur le trottoir, ils les coiffent avec des cônes de signalisation.
Mots : pet de nonne, lait de poule, babeurre, sybarite